Chacun cherche sa place

Après la pause, Esther a déposé ses affaires et s’est assise sur la chaise de la coach près du paperboard. La coach lui demande « peux-tu te déplacer s’il te plait ? » Elle répond sèchement « Non je suis bien, là »

La question de la place : un avant-goût de cette première journée de coaching d’équipe qui vient de démarre. Finalement, Esther se déplace près de la fenêtre et l’ouvre en disant « j’ai besoin de respirer ! ». Le groupe soupire, excédé par le comportement d’Esther qui a toujours besoin de se faire remarquer : « Cette place ce n’est pas la tienne, c’est celle de la coach et ça se voit. » commente un de de ses coéquipiers.

Bruno, le manager avait prévenu la coach lors de la préparation du séminaire que « dans notre équipe, ce n’est pas facile de trouver sa place, de reconnaitre les contributions respectives ou encore d’intégrer de nouveaux co-équipiers. »  L’équipe confirme, lors de son auto-diagnostic, les propos de Bruno. Ils sont tous d’accord pour en faire un des objectifs principaux du coaching collectif. Au cours de cette journée, l’équipe constate que le manager lui-même n’a pas de place, qu’il n’est pas reconnu comme le manager. « Et pourtant lorsque j’ai pris cette équipe, j’arrivais avec une solide expérience de management d’équipe » constate-t-il perplexe. « Et je me suis senti harcelé par les demandes d’Esther, ses mails dans lesquels elle me rappelait toujours ce que je devais faire ». Bref, chacun cherche sa place, quelle que soit la réalité de ses compétences et son expérience professionnelle.

Dans de nombreuses équipes, et notamment celles d’enseignants-chercheurs, de médecins, de scientifiques, nous observons que souvent, le chef n’est pas véritablement reconnu. Sa légitimité n’est pas assise sur :

  • Sa compétence technique : il peut être perçu insuffisamment compétent par ses collaborateurs dans leurs domaines respectifs, ces derniers peuvent également se référer à une instance extérieure qu’ils jugent plus compétente que leur chef.
  • Sa capacité à tenir le cadre managérial ce qui conduit certains membres de l’équipe, inconsciemment, par conscience professionnelle, à exercer à sa place des missions de chef, à faire le chef par exemple en rappelant les valeurs, les objectifs, la mission, l’importance des réunions d’équipe. Ce faisant, la personne prend la place du chef en se mettant symboliquement en parité avec le leader officiel.

Dans les jours et semaines qui ont suivi le séminaire de coaching, les résultats se sont vite fait sentir :

  • Soulagement : lorsque la coach a rappelé, à plusieurs reprises, les objectifs, le cadre, les places respectives de chacun, l’équipe et notamment Esther ont pu respirer, se détendre.
  • Expression des ressentis (agacement, frustration, peur de mal faire, de blesser l’autre…) qui ont été méta-communiqués pour apprendre à se dire les choses en authenticité, au service de la qualité des relations

L’espace de dialogue ouvert par le coaching a permis à chacun d’exprimer ses attentes à propos du fonctionnement de leur équipe, ses doutes et ses peurs quant à la capacité individuelle et collective de réussir les missions.

  • Apprentissage de la co-responsabilité, qui commence par se donner des règles de fonctionnement. Cela permet d’éviter que certains s’épuisent à rappeler aux autres les règles et les missions en croyant bien faire, et exaspèrent l’équipe.
  • Cohésion autour du manager : l’équipe est parvenue à la conclusion qu’elle avait besoin d’un management fort c’est à dire capable de dire les choses et de tenir le cadre afin que chacun des équipiers puisse prendre sa place, travailler sereinement et coopérer avec les autres membres de l’équipe.

Cette première étape a créé un socle de confiance suffisamment solide que les équipiers disent à Bruno le manager : « c’est toi qui dois tenir notre équipe, qui dois nous rappeler quand nous nous égarons ». Ils donnaient ainsi la légitimité et la place à leur manager et ont construit ensemble le cadre managérial dont chacun avait besoin pour travailler en sécurité, en lien avec les autres et en se sentant reconnu.

Esther a été la première à oser parler de ce « manque de management ». Au travers de son comportement «dysfonctionnel» – prendre la place de la coach -, elle testait les limites, la capacité de la coach à tenir son cadre. Esther a convoqué le sujet de la place et de l’agacement dès le début du coaching, au nom de l’équipe. En coaching systémique, le coach s’appuie sur une lecture du comportement et du langage non-verbal des membres de l’équipe comme autant de leviers de transformation. Merci Esther !

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